Les Particules élémentaires reviennent à l’Odéon pour une fascination prolongée

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L’ouvrage de Michel Houellebecq avait déjà été adapté sur la scène des Ateliers Berthier fin 2014 avec la même troupe et le même metteur en scène. Julien Gosselin revient avec une mise en scène identique, ce grand parterre gazonné entouré de sièges où chacun des 10 excellents comédiens occupe silencieusement la scène en attendant son heure. Pas de vraie nouveauté mais toujours la même fascination devant une histoire d’humanité flasque réduite à l’état de chair molle. Les sentiments sont minuscules et seule reste l’exaltation physique pour ressentir un semblant d’émotion. Le texte des Particules élémentaires avait fait l’effet d’une bombe lors de sa sortie en librairie en 1998, la pièce rappelle la cruelle actualité d’une humanité acculée dans une impasse autant existentielle qu’affective. Une pièce qui plonge toujours autant le spectateur dans des abimes de perplexité sur l’état de décomposition de l’individu occidental.

Un texte cru et chirurgical

Les Particules élémentaires s’intéressent à deux demi-frères confrontés au mal du siècle, cette solitude mêlée d’abattement qui ronge l’esprit comme un cancer. Bruno et Michel se débattent dans une existence privée de sens. Le premier choisit une voie élégiaque pour se sentir vivre tandis que le second s’enferme dans une prostration qui le verra pourtant révolutionner l’humanité. Les rapports humains sont réduits à leur portion congruent seuls restent des corps qui se frôlent sans vraiment se connaitre, l’heure est à la satisfaction plus qu’à la connaissance de l’autre. Michel Houellebecq le décrit froidement, la déshumanisation est en marche et l’empathie a laissé place à un immense sentiment de vide mêlé de cruauté. La solidarité a laissé place à la compétition avec une proportion de plus en plus grande de laissés pour compte. Le progrès est devenu une notion du passé.

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Une mise en scène totale

Le metteur en scène Julien Gosselin multiplie les narrateurs dans un dynamisme sans temps morts. Un sosie de l’auteur s’insère au milieu des personnages, mimant son physique si reconnaissable, son attitude à la limite du ridicule et son accoutrement habituel. Les personnages interviennent au fur et à mesure de l’action, descendant du promontoire entourant la scène, ils se parlent mais s’évitent le plus souvent. Un immense écran disposé à l’arrière scène affiche des messages récurrents en même temps qu’une musique spectrale aux tonalités électro-rock raisonne comme une bande son de film d’horreur. L’étrange sincérité froide des textes déclamés font parfois rire quand leur brutalité n’effraye pas. Le miroir tendu à l’audience reste toujours autant sans concessions. Seul bémol à cette reprise théâtrale, la taille réduite de la scène du Théâtre de l’Europe diminue la portée du texte et de la mise en scène, les Ateliers Berthier avaient le mérite de l’ampleur pour un effet démultiplié sur le spectateur. Mais seuls sont qui auront déjà vu la pièce en 2014 pourront s’en rendre compte.

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Un buffet froid

Le texte de Houellebecq reste d’une cruelle actualité presque 20 ans après sa parution, le trou de l’humanité a même certainement continué de se creuser inexorablement pour un constat accablant proposé par l’auteur:  » Le pays qui lui avait donné naissance basculait lentement, mais inéluctablement, dans la zone économique des pays moyen-pauvres ». La description sociale est décourageante mais l’auteur a le bon gout de la doubler d’une perspective de science fiction novatrice et encourageante. L’humanité obligée de se renouveler pour ne pas s’effondrer. trouve finalement un second souffle. D’où le titre avec ces fameuses particules élémentaires dont le sens se dévoile peu à peu. La science est peut être la solution pour une société à bout de souffle.

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Conclusion

La pièce jouée à l’Odéon conserve la force implacable entrevue en 2014. Si l’intrigue se situe très souvent en dessous de la ceinture, c’est bien pour figurer l’agonie d’une société privée de sens, toute entière tournée vers la satisfaction de ses plaisirs pour ne pas verser dans le désespoir. Reste un moment de pure électricité, cruellement assumé et parfaitement interprété.

Plus d’info sur le site de l’Odéon.

 

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La bande annonce :

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