The Revenant est une vraie claque cinématographique, de celles qui marquent l’histoire et font entrer dans une autre dimension. On savait Inarritu plutôt radical, il va gagner le titre de capo chef aux vues des conditions de tournage dantesques imposées à l’équipe de tournage. Pour un résultat grandiose, imparfait mais impressionnant. Des acteurs habités, une maitrise terrifiante de la mise en scène. On ne peut pas sortir indemne de la projection.
The Revenant est disponible en précommande en Blu-Ray chez Amazon et en Blu-Ray 4K Ultra HD.
L’accident bête
Hugh Glass (Léonardo DiCaprio) joue de malchance. Ses collègues trappeurs se font occire par des indiens en furie, la récolte de fourrures est en grande partie perdue et une mère ours belliqueuse manque de lui faire la peau. Très mal en point, il ne peut compter que sur ses collègues survivants pour le ramener entier au lointain camp de base. Mais les conditions atmosphériques dantesques contrecarrent son rapatriement et John Fitzgerald (Tom Hardy) prend la décision de l’abandonner. Ni la météo ni les 300km n’auront raison du caractère de chien de Glass, déterminé à se venger.
Un film en tout point radical
Annoncé comme le futur grand vainqueur des Oscars, The Revenant marque l’emprise d’Inarritu sur le cinéma actuel. Peu de réalisateurs depuis Kubrick n’ont fait montre d’une telle radicalité dans leurs réalisations. L’ombre du grand Kubrick plane sur la carrière du grand Alejandro, car à qui d’autre le comparer? Tourné en milieu polaire, sous des températures locales donc glacées, à des heures où la lumière permet le tournage, The Revenant suit les acteurs crapahuter dans 30cm de neige et crawler dans des rivières gelées. Ce qu’il ne faut pas faire pour gagner une statuette… Le film se déroule loin de tout, en plein territoire hostile, en plein XIXe siècle. Des conditions optimales pour un pique nique. Entre indiens, ours et rudesse du climat, les acteurs autant que l’équipe de tournage ont du bien profiter. J’imagine aisément le preneur de son et le caméraman harnachés dans leurs polaires et greloter en suivant Léo tout nu dans la neige. Un autre monde…
Un Inarritu impérial
La réalisation force le respect; Inarritu ose le plan séquence spectaculaire et nous rappelle l’immense Birdman. Là où Michael Keaton et ses camarades déambulaient dans un théâtre dans un (faux mais génialement monté) éternel plan séquence, Inarritu offre une bataille sans coupe dans l’image. Une sorte de prouesse cinématographique, surtout sous des latitudes quasiment arctiques. Les pérégrinations de Léo sont suivies au plus près, la caméra insiste sur la souffrance physique du héros. Révélant par là même sa détermination à survivre. A sa place, je me serais noyé 10 fois et j’aurais fini bouloté par les loups… Les lumières sont naturelles, les paysages sont grandioses, la nature est reine. Chaque pas dans la neige résonne aux oreilles, l’atmosphère hostile se fait proche du spectateur. Et Inarritu invoque quelques grands réalisateurs…
Un Terrence Malick omniprésent
Excusez du peu, Inarritu rappelle le grand Terrence Malick dans ces scènes sublimes et oniriques où le héros se remémore la joie passée. Caméra quasi collée au personnage, plans à hauteur de visages, nature omniprésente, Inarritu invoque La Ligne Rouge ou A la merveille. Pas une habitude nouvelle chez Inarritu, Biutiful et Babel utilisaient des procédés identiques. Mais l’ajout de plans naturalistes dans la foret canadienne ne laissent pas de doutes. Les deux réalisateurs partagent le même gout de l’authenticité. Pas de dialogues, juste des regards et une musique vibrante. Du grand art contemplatif et profond.
Des acteurs roulés dans la gadoue
Si DiCaprio ne reçoit pas l’Oscar pour son rôle, je le vois bien rentrer dans les ordres et devenir frère Léonardo. Voyez plutôt. Le mec, végétarien dans la vie, mange de la viande crue à l’écran, on le fait dormir dans une carcasse d’animal (parait il réelle), il se traine dans la neige, il prend un bain dans une rivière gelée, c’est de l’implication totale. Impossible de ne pas lui souhaiter la statuette de tout mon coeur. A côté de lui, les autres acteurs sont super crédibles, à commencer par un Tom Hardy lui aussi impressionnant. Seule remarque, il refait le coup de Bane dans The Dark Knight Rises et on ne comprend pas du tout ce qu’il dit. Il semble mâchouiller sa langue, c’est assez désagréable pour moi, surtout après tant d’années à pratiquer l’anglais… le reste du casting est essentiellement masculin et ça ne rigole pas. Les quelques femmes finissent violées ou décimées. L’homme est un véritable loup pour l’homme…
The Revenant ou Birdman?
Je vais finir par une conclusion très personnelle. Je pourrais revoir Birdman tous les jours, je pense que je reverrai The Revenant à sa sortie mais guère plus. Le premier est-il pour autant meilleur que le second? Birdman est un plaisir de cinéphiles avec ses multiples références et son incomparable rythme. The Revenant est un film plombant, éprouvant. Je ne suis pas sûr de vouloir revivre le calvaire de Léo tous les jours. Les nombreuses longueurs font un peu bailler et l’ambition du film peut fatiguer les cinéphiles amateurs en même temps que la grande violence les âmes sensibles. Voilà, quelques bémols nécessaires. Mais n’oublions pas l’essentiel. The Revenant est un pur moment de cinéma. Rocky enchaine les pompes sur une main et les entrainements frénétiques, Léo brave les éléments. Les acteurs ne reculent devant aucune souffrance pour un résultat unique.