La saga Rocky est ancrée au plus profond de la mémoire collective. Comme Star Wars ou Die Hard. Ce n’est plus seulement du cinéma, plutôt de la mythologie avec ses héros et ses démons à terrasser. L’annonce d’un nouvel épisode fait frissonner, laissant espérer le meilleur et craindre le pire. Creed tente le renouvellement de génération, invoquant les glorieux ainés et marquant le début d’une nouvelle ère. C’est réussi, le film se regarde avec la larme à l’oeil quand retentit le fameux air à la trompette au début du 12e round. Rocky est éternel.
La critique du film Creed
Les 4 premiers Rocky sont marqués du sceau de la légende. L’histoire est connue. Acteur à la ramasse, apparu subrepticement dans le Bananas de Woody Allen, Sylvester Stallone envoie un scénario aux studios américains. L’histoire d’un boxeur amateur désigné pour affronter le champion du monde des lourds. Le film est tourné avec les deniers personnels de Sly et rencontre un phénoménal succès. Quand le film remporte l’Oscar 1977, c’est le début de la consécration. Suivront Rocky II, avec la revanche de Rocky contre Apollo Creed, Rocky III avec Mr T qui terrasse un Rocky mollasson et Rocky IV contre les Russkofs. Tous les autres épisodes sont de pales copies indigestes. Le premier Rocky reste un souvenir cinématographique marquant. Rocky qui casse 5 oeufs dans un verre au petit matin et les avale cul sec. Le vieil entraineur Mickey complètement atrabilaire mais malin comme un renard. Adrieeeeeenne et son roublard de frère Paulie. Un vrai univers, auquel on ne peut qu’adhérer. Un film éternel
La scénographie des combats de boxe est née dès le premier Rocky. Des coups qui pleuvent, des geysers de sang, des acteurs pas extrêmement crédibles. Beaucoup trop musclés et pas assez rapides. Mais ça marche, ça participe à une atmosphère tragique, le héros prend des coups pour expier ses fautes et se racheter. Tous les autres épisodes garderont le même style. Et figurez vous que Creed ne déroge pas à la règle. Je ne sais pas si vous avez déjà regardé un vrai combat de boxe mais donner un coup est l’assurance d’en recevoir au moins deux. Et les acteurs se livrent sans crier gare, se prenant une avalanche de pruneaux. Bref, je m’arrête là. Creed est un digne héritier du Rocky Balboa original si on en juge à l’état de son visage à la fin du combat.
Evidemment, Stallone est de la partie. Légende vivante statufiée dans un square de Philadelphie, il vivote dans son restaurant. Si les glorieuses heures sont passées, son aura est intacte. Le jeune Adonnis Creed le rencontre pour lui soutirer toutes ses astuces. Et l’étalon italien se transforme en ce fameux entraineur de ses jeunes années. Rocky devient un Mickey sage comme un vieux routier et peut être un peu plus charpenté. Chacune de ses paroles sent l’expérience de la consécration d’antan. Enfin, quand on le comprend. Sly semble se mâchouiller les joues à chacune de ses interventions, me rappelant le Brando du Parrain I. Si le botox et quelques liftings sont passés par là, Stallone garde son charisme et sa présence justifie cette suite qui, sans lui, serait moribonde.
A l’instar du premier Rocky, les scènes d’entrainement de Creed sont les plus palpitantes. Jordan sue mille eaux pour se mettre au niveau. Stallone faisait des pompes sur une main à l’aise, lui semble un peu souffrir. Mais s’il commence en bas de l’échelle, ne parvenant d’abord pas à attraper le fameux poulet dans la basse cour, il parvient, à force d’efforts, à lui faire un sort. A moins que ce ne soit le poulet qui se fatigue, comme lui rappelle Rocky. Métaphore du struggle for life, ce Creed fait plaisir. Les ingrédients légendaires sont bien assaisonnés et la mémoire des personnages disparus pèsent sur le coeur. Je ne révèlerai pas toutes les péripéties de ce nouveau début de saga, des Creed 2 à 18 sont à prévoir dans les années à venir. Dolph passera peut être une tête à l’occasion?
Un mot sur la nouvelle génération. Au contraire d’un Rocky plutôt renfermé à ses débuts, voire timide, Michael B Jordan fait le fanfaron. Issu d’une lignée prestigieuse, il n’a pas connu les rudesses de la rue. Mais il se forge un caractère et une carapace. Habitué à dégoupiller au premier regard de travers, c’est au contact de Rocky Yoda qu’il apprendra à s’éloigner du côté obscur de la force. Belle maxime de vie. Quant au physique de Jordan, c’est assez impressionnant. Chaque muscle se dessine, c’est presque trop. Surtout que son dernier adversaire donne l’impression d’avoir une petite couche de caramel sur les plaquettes de chocolat. Mais la crédibilité n’est pas l’enjeu principal. Des petits arrangements sont nécessaires pour toucher la légende.
Bilan
Ce Creed est un pur moment de pop corn movie, avec l’émotion en plus. Les rappels à la saga originale foudroyent le petit coeur fragile du rédacteur attendri. Stallone livre une prestation touchante qui, sans lui garantir l’Oscar, donne à espérer pour la fin de sa carrière. C’est reparti pour quelques épisodes de boxe débridée.