Il y a de ces marques qui ont bien fait leur job, à savoir marquer. Ces marques sur lesquelles le nom et parfois le slogan résonnent même après des décennies comme la sonorité d’une belle époque, de temps anciens voire révolus car ces dites marques – pourtant fiers fleurons d’une industrie française du siècle dernier – ne sont plus, n’existent plus… KELTON en fait partie, ou plus précisément en a fait partie avant d’opérer son revival. Marque notoire dans l’horlogerie française, connue pour ses montres chics, variées et abordables, elle se faisait connaître en scandant son slogan « Vous vous changez, changez de KELTON ! ».
Pour preuve : jeter un œil sur les vidéos de publicité d’INA. Vous ne pourrez pas dire que ce bain dans ces années 70 et 80, en noirs et blancs puis en couleurs timides quand ces pubs étaient diffusées sur des écrans cathodiques, ne fait pas du bien. Il en dit long sur l’histoire de la marque KELTON, et comment celle-ci s’est fait connaître dans la France des Trente Glorieuses au point d’y laisser son empreinte.
Car c’est dans les années 50, en leur milieu (1955), que les premières montres KELTON sont sorties des usines pour s’enrouler autour du poignet des français. À la base, c’est la rencontre du géant américain de l’horlogerie TIMEX, souhaitant délocaliser sa production, et de Stéphane BOULLIER, fabricant de montres à Besançon, qui orchestra la naissance de KELTON.
Dès le départ, et toujours actuellement, le choix est posé de proposer aux français des montres aux prix bas – mais sans renier la qualité – sans passer par les horlogers et les bijoutiers pour vendre ces dernières. Vous pouviez les acheter dans votre bureau de tabac, aux stations-service, drugstores et grands magasins. Se positionnant ainsi, KELTON a sûrement aidé à la démocratisation de la montre, accessible à plus de clients car vendue moins cher et dans des lieux plus publics.
Ce qui aura permis le développement rapide de KETON et une véritable success story pendant plus de quinze ans. Dans les années 70, c’est plus de quatre millions de montres KELTON qui seront vendues.
Puis un déclin progressif, avec l’arrivée des montres à quartz et de la mondialisation. La marque KELTON reste emblématique mais cet emblème faiblit, souffrant de la concurrence et n’ayant pas su se moderniser (ce qu’elle reconnait humblement aujourd’hui), jusqu’à arrêter sa production. C’était en 1987.
KELTON aurait pu en rester là, et être de ces marques qui ont pris fin comme tant d’autres à la sortie des Trente Glorieuses, que sont Simca à l’automobile, Olida au pâté, Radiomatic à l’autoradio… Les exemples pourraient s’enchainer. Mais récemment, un peu plus de trente ans après, elle a fait le choix de changer de camp pour rejoindre celui des marques opérant avec succès leur revival – à l’instar du Coq Sportif, Solex, Meccano… là aussi, il y a plusieurs (bons) exemples. C’était en 2018.
KELTON. Un nom et slogan qui lui sont restés, à l’heure où la marque renait de ses cendres depuis quelques années, renaissant en ne reniant pas son héritage, de son savoir-faire à sa gamme simple de montres élégantes faites pour satisfaire au plus grand nombre. Sa première collection marquant son grand retour reprend son ADN, les codes historiques keltoniens, en proposant des montres au style néo-rétro, enrichies des tendances actuelles, et (surtout) produites en France.
La preuve en images, dans leur collection homme, vintage et variés, qui en a pour tous les gouts et toutes les bourses. Là aussi, comme ce doux bain dans les années 60 et 70 cité plus haut, nous apprécions ce retour aux fondamentaux pour des modèles de montres simples et intemporels. Dont la Vietnam, iconique bestseller de la marque, que nous testons ci-après.
Notre test de produit
La montre Vietnam
Pour l’auteur de ces lignes, la Vietnam ne pouvait lui passer entre les mains sans s’accrocher à son poignet gauche le temps d’un essai. La Vietnam est une montre mais avant tout un pays qui fut l’objet d’un de ses plus beaux voyages, en trek dans les montagnes, à s’enfoncer dans la végétation touffue des forêts, allant de villages en villages, d’ethnies en ethnies, de ce pays sublissime autrefois et pendant près d’un siècle protectorat français sous le nom d’Indochine.
Plus tristement et tragiquement ensuite, le pays fut marqué après la décolonisation par la guerre qui a aussi pris le nom de Vietnam. KELTON en a puisé son inspiration pour créer cette montre d’inspiration militaire, qui était alors produite dans les fastes années de la marque, en rééditant et réactualisant lors de son retour en 2018 ce modèle qu’elle désigne comme « la plus baroudeuse des KELTON ».
En ressort une élégante montre au bracelet Nato en cuir véritable à effet vieilli de couleur olive, léger sans être trop épais, qui peut être portée simplement ou accessoirisée avec des bracelets autant en cuir qu’argentés et surtout : qui s’adapte à différents styles. La montre ne jurera pas avec un costume strict de couleur foncé, autant qu’elle s’adaptera avec un style plus hipster et plus décontracté. Sa simplicité n’exclut pas son raffinement ni son authenticité, de par son petit boîtier de 37 mm, son cadran noir, son verre dôme, ses éléments chromés et ses trois aiguilles blanches et noires avec des pointes rouges pour faciliter la lecture de l’heure. C’est une baroudeuse, certes, avec une inspiration militaire mais aussi et à notre avis d’un esprit colon.
Question technique, le boitier métallique est équipé d’un mouvement japonais à trois aiguilles, et d’un mécanisme automatique. Exit la petite pile, la montre est à mouvement mécanique dont l’énergie est fournie par un ressort enroulé dans un barillet, qu’il faut remonter. C’est certain que nous ne sommes plus trop habitués à remonter nos montres, alors que c’était un des gestes quotidiens de nos pères Gentlemen et de leurs pères, pour leurs montres et la grosse horloge familiale de la maison de famille ! Mais ce retour, ce défi aux montres à piles, peut être aussi finalement perçu comme un geste écologique. Créer de l’énergie sans en dépenser autre que par un simple mouvement rotatoire du bas vers le haut.
Question utilisation… c’est une montre, donc pas grand-chose à vous dire dessus. Si ce n’est qu’elle est légère et peu encombrante, discrète, que son cuir ne tâche pas et respire et qu’elle s’adapte (comme dit plus haut) à plusieurs styles.
Puis pour finir, le prix. 129 €, frais de livraison compris, nous parait fortement raisonnable pour une montre de cette qualité et de cet élégant design. KELTON respecte ainsi son héritage de proposer des montres avec un tel rapport qualité/prix. Et en plus, la montre dispose d’une garantie de deux ans.