Quelques conseils pour apprivoiser l’œuvre du maitre au Musée Picasso

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Depuis 30 ans, le Musée Picasso regroupe la plus grande collection mondiale des œuvres du maître espagnol au cœur du Marais. Peintures, dessins, sculptures, collages, tout l’éventail des multiples procédés utilisés sont visibles dans le cadre prestigieux de l’Hôtel Salé. L’écrin est flamboyant et magnifie le vertigineux amalgame de classiques et d’incunables. Autoportraits, peintures ultra-connues et destructurées de Dora Maar, essais sur les Demoiselles d’Avignon (tableau présent) au Moma de New York), le voyage dans le temps est un must pour qui veut admirer et en apprendre plus sur l’œuvre pléthorique du grand Pablo. Petits conseils pour profiter au maximum du foisonnement artistique proposé par le Musée Picasso.

Premier conseil : penser à impérativement réserver une place pour une visite guidée. Déambuler au petit bonheur la chance peut être agréable mais les informations dispensées sont indispensables pour bien capter les intentions et les évolutions. Les œuvres sont certes belles, grandioses et célèbres, mais Picasso ne dessinait pas au hasard. Ses courbes sont riches en significations, ses choix picturaux ont des symboliques. Les œuvres des années 1920 sont légères, les années 1930 et leur atmosphère belliqueuse impactent durement le graphisme. Vous pourrez prendre des audioguides mais rien ne vaut l’interaction avec un guide en chair et en os, de qualité, pour la modique somme de 20 €. Je ne peux que vous recommander l’expérience pour profiter au maximum de la visite. Elle dure une heure, elle est complète et synthétique, et on en sort relativement en forme sans avoir l’impression d’avoir la tête remplie comme une citrouille.

Le parcours est didactique et pédagogique. Les salles du premier et du deuxième étage retracent le parcours artistique de Picasso, de sa naissance à son trépas, entre 1881 et 1973. La légende raconte que Picasso continuait à peindre, 10 minutes avant son trépas, quel homme ! Le fil rouge sera cette citation du minotaure espagnol : « Quand j’étais enfant je dessinais comme Raphaël mais il m’a fallu toute ma vie pour apprendre à dessiner comme un enfant ». Fausse modestie mêlée à un orgueil démesuré, tout le personnage est résumé dans ces quelques mots. Le sentiment de sa grandeur l’a accompagné toute sa vie, l’aidant à franchir des étapes et à oser les révolutions picturales. La vision de masques africains le dirige vers ces représentations androgynes où les frontières homme/femme sont abrogées, les visages deviennent des masques, l’individualité est remplacée par un symbolisme désincarné. Avec Braque, il s’inspire des paysages de Cézanne pour déconstruire la perspective et la résumer par un plan en 2 dimensions. Ramenés à des représentations archaïques, les corps sont déstructurés, éparpillés en de multiples détails et perdent en évidence. La peinture passe un cap. Après la révolution impressionniste, Picasso mène le mouvement pour poser de nouvelles questions et chercher dans la symbolique plus que dans la représentation. Ses peintures ne s’adressent plus seulement aux yeux mais à l’intelligence du spectateur.

Le parcours est saisissant de pertinence. Les années de jeunesse voient le déterminé Picasso chercher chez les classiques et les impressionnistes. À l’orée du xxe siècle, il tente les innovations. Symbolisme, cubisme, surréalisme, collages, Picasso était un précurseur. Rien ne l’arrêtait. Ce qui se retrouve dans sa vie personnelle.
Homme à femmes, minotaure sexuel et insatiable jouisseur, il collectionna les femmes dont il eut quatre enfants. Marie-Thérèse, célèbre muse de Picasso, rencontrée par celui-ci dans la rue, n’eut pas d’autres choix que de se plier à la boulimie sensuelle de son encombrant démiurge, acceptant notamment sa liaison avec Dora Maar. Les portraits de ces deux femmes se regardent dans l’exposition, mettant en valeur l’opposition de leurs deux personnalités. Dora Maar est représentée en femme de caractère, aux doigts pointus et rouges, couleur d’ailleurs omniprésente dans ce tableau ; la douce Marie-Thérèse est, quant à elle, toute en rondeur et colorée d’agréables pastels. Picasso brisa les cœurs et enchaîna les moitiés au rythme de ses envies.

La visite fait découvrir Picasso mais aussi ses influences. Une collection privée cédée à l’état français donne un vaste panorama de ses gouts et influences : Cézanne évidemment, mais aussi Braque et Gauguin. Lors de son décès, ses ayant-droits découvrirent 40 000 œuvres entassées dans les ateliers. Picasso aimait s’entourer de ses œuvres pour évoluer, passer à d’autres étapes et toujours avancer, jusqu’à enfin, être capable de dessiner comme un enfant, ce que montre l’un de ses derniers autoportraits.

Longtemps contemplateur d’un artiste que je ne comprenais finalement que peu et qui semblait me résister, ses œuvres me semblent aujourd’hui moins hermétiques et enrichies d’un nouveau sens. Même si d’autres peintres modernes comme Kandinsky, Braque ou Dali me touchent plus, (les gouts et les couleurs !), je ne pourrai dorénavant plus critiquer Picasso à la légère. Comme le dit si bien la chanson des Modern Lovers, « Pablo Picasso was never called an asshole ». Une visite dans ce musée Picasso achèvera de vous convaincre. Laissez-vous tenter par cette odyssée picturale sans équivalent.

Adresse web : http://www.museepicassoparis.fr/

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