L’inoxydable Bob Dylan sur scène, unique et mythologique

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Lundi 19 octobre, la routine du matin n’est rien de moins que très habituelle. Lever 7h, petit dej, lecture des mails. Rien de spécial ne prédispose ce matin en particulier à un quelconque séisme de magnitude 9. Et pourtant, la surprise est totale à la lecture de ce mail, bientôt encadré sur les murs de mon salon: L’équipe de Rock&Folk a le plaisir de vous annoncer que vous faites partie des gagnants du jeu-concours Bob Dylan. Vous remportez donc une invitation pour deux personnes pour le concert de Bob Dylan au Palais des Sports ce soir, lundi 19 octobre à 19h30. Lecteur historique de Rock & Folk depuis 1993, je participe régulièrement aux concours organisés par le canard rock, sans jamais rien gagné. Ce n’est pas leur faute mais la mienne. Estampillé plus grand chat noir universel, j’ai abandonné toute espérance de victoire au Loto depuis bien longtemps. Mais le destin est taquin, il s’amuse à me donner le fol espoir d’une chance enfouie dans les nids de poule de mon existence. Bob Dylan a frappé à ma porte et je la lui ai ouverte. Je le verrai donc sur scène une fois avant mon trépas. Ainsi soit-il.

 

Sésame, ouvre toi!
Sésame, ouvre toi!

 

Pour ceux qui l’ignorent encore, le vrai nom de Bob Dylan est Robert Zimmerman. Né le 24 mai 1941 dans le Minnesota, il n’a plus rien du jeune homme goguenard et frondeur de ses premières pochettes d’albums. A maintenant 74 ans, il s’acharne à méticuleusement relever les parcmètres d’un Never Ending Tour débuté à la fin des années 80, devant des foules toujours plus fidèles, nombreuses et enthousiastes. L’homme bénéficie d’un retour de flammes critique depuis 1997 et la sortie de son album Time out of mind. Tout le monde admire ses albums que plus personne n’achète ni n’écoute. Dylan est devenu une sorte de pythie de Delphes, révérée et sanctifiée, non plus écoutée mais admirée. Le personnage est devenu plus grand que son oeuvre, illustre parce que mythifié de son vivant. Et si personne ne connait plus ses dernières chansons, tout le monde vient pourtant les écouter pour scruter ce petit bonhomme juché dans ses bottes de cowboy, chapeau Gambler vissé sur la tête et démarche hésitante. Il n’est jamais plus vigoureux qu’assis à son piano, martelant le sol en rythme avec ses bottes.

 

La salle piaffe d'impatience
La salle piaffe d’impatience

 

La période culte du Zim se situe dans les années 60 avec une trilogie magique: Bringing it all back home, Highway 1961 Revisited et Blonde on Blonde. Albums adorés par beaucoup, ils ont gravé dans le marbre le génie du poète/troubadour/compteur/magicien Dylan. 50 ans, et toutes leurs dents. Depuis 1965, rien ne semble avoir beaucoup changé… Avec 36 albums au compteur, Bob a gravé d’autres pépites. Blood on the tracks, Desire, Oh Mercy notamment. De ces albums historiques, très très peu d’extraits ce lundi 19 octobre. Sur 20 chansons dispensées à une foule en totale osmose, je n’en ai identifié que deux: Tangled up in Blue à la 9e et Blowin’ in the wind à la 19e. Car le bestiau traficote les orchestrations, adapte les rythmes à sa locution hésitante, marmonne de manière quasi inintelligible. Il m’a fallu à chaque fois attendre les refrains pour discerner les deux seuls titres connus.

Informations glanées sur le net, la setlist ne contient en grande majorité que des titres des deux derniers albums Tempest et Shadows in the night. Pas de Like a Rolling Stone, Hurricane ou Knockin’ on Heaven’s Door. Pas la peine de les réclamer, Bob ne s’adresse à la foule que pour prévenir de l’entracte. Pas de Bonsoir Paris ou Hello Froggies. Non, l’heure n’est pas à la blague. Les rumeurs colportent qu’il se fait grassement rémunérer pour chacune de ses apparitions dans le but de payer les multiples pensions alimentaires issues de ses nombreux divorces. Un grand romantique que ce Bob. Mais alors comment expliquer que ce concert puisse rester une étape marquante sur le long chemin de mes concerts, aux cotés de Paul McCartney, des Rolling Stones, de Pink Floyd ou d’ACDC?

 

IL est arrivé, tout rabougri
IL est arrivé, tout rabougri

 

D’abord rebuté par le montant astronomique de la dime à acquitter pour avoir le droit d’apercevoir l’idole des jeunes, je saute au plafond une fois le mail lu. Contradiction totale. Je n’ignore pas que la diva ne met aucune passion dans ses prestations et pourtant je piaffe à l’idée d’assister à un de ses concerts. Attifé comme un vieux proxénète, il concentre une heure et demi durant l’attention d’une foule de jeunes et (beaucoup) moins jeunes. Quel est son secret? L’enterrer trop vite, c’est oublier la place centrale qu’il occupe dans l’histoire de la musique. Dylan est un mythe vivant, un Phoenix maintes fois carbonisé et toujours rêne de ses cendres. Une vigie droite dans ses bottes, incarnation d’un idéal de liberté révolue et fantasmatique. Le petit bonhomme a été grand, au coeur de la mêlée de l »histoire. Indifférent mais concerné, à l’écart mais tout en haut du panthéon.

 

Bob sur scène, nonchalant et mal assuré
Bob sur scène, nonchalant et mal assuré
 

L’enchainement des morceaux jazzy, bluesy ou country, avec une inimitable dégaine de crooner, fait agir le charme. J’ai assisté à un concert de Bob Dylan, le jour est historique et sera marqué au chalumeau sur mon journal intime. Si la voix et les chansons ne sont pas forcément au rendez-vous, l’émotion est palpable. J’ai vu Bob Dylan et c’est sans prix. Unique. Il peut partir en paix.

 

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