50 nuances de Grey (2,5/5) était promis au fist fucking (ahah) par une critique armée de battes et de fouets (uhuh). Comme attendu, l’adaptation du best seller d’EL James est immédiatement parvenue à faire l’unanimité des blogs ciné contre elle. Un peu comme Qu’est-ce-qu’on a fait au bon Dieu, le film a pourtant drainé un public nombreux dans les salles obscures tout en essuyant un tir de barrage nourri de la part de détracteurs enflammés. Incohérence? Contradiction? Phénomène déjà observé trop fréquemment? Passé la période initiale de passions, de déchirements et de cris dans tous les médias, ma collaboratrice m’a trainé par les cheveux pour me permettre de me faire une opinion objective. Compte-rendu.
En préambule, quelques précisions. Je n’ai pas eu l’honneur de lire la trilogie événement. Le film est une adaptation et je ne pourrai donc pas juger la fidélité ou le parti pris de la réalisatrice immensément connue Sam Taylor-Johnson (? Hey, what did you expect? David Fincher?). Pour rappel, elle a commis le très bon Nowhere Boy, biographie hagiographique sur la jeunesse du jeune John Lennon avant les Beatles. Heureuse acquisitrice d’un des très rares 40 millions d’exemplaires vendus mondialement, ma collaboratrice m’a tenu informé du déroulement plein de surprises de la rencontre entre Christian Grey et Anastasia Steele. Et je me souviens m’être dit, à l’écoute du futur culte « I don’t make love. I fuck… hard! »: mais la nana est actrice X pour accepter de sortir avec un mec pareil? Bref, je n’avais pas spécialement envie de voir un film de boules (ihih) mais l’avalanche médiatique m’a convaincu de me faire une religion. Je me suis donc assis à l’UGC Danton vierge (ahah) de toute expectative. Alors je vais tenter d’expliquer pourquoi le film ne m’a pas déplu tout en ne me faisant pas grimper aux rideaux (ouhouh).
50 nuances de Grey a tout du fantasme sur pattes. Une jeune étudiante gauche et sans saveur captive un jeune milliardaire qui joue du Bach et du Chopin au piano. Il est sexy, immensément riche, intense et mystérieux. Premier accroc : Jamie Dornan peine à donner l’ampleur requise par l’énigmatique golden boy. Froncer les sourcils et fixer dans les yeux ses interlocuteurs ne suffit pas à donner de l’épaisseur. Ça passe lorsqu’il est filmé de près mais le subterfuge tombe en plan large. En fait de nuances, le jeu de l’acteur n’en possède que peu. Et le ton est donné: le film sera lisse, dépouillé, plus blanc que blanc, de l’amour passé à la machine à grand renfort de javel. MAIS on comprend que l’acteur est raccord avec le concept. Un acteur trop charismatique aurait juré dans cette ambiance Ajax propre. Il est donc parfait. Pas un poil sur les bras ni sur le torse, des biscotos finement ciselés, ce n’est pas un bodybuilder, juste un beau gosse (qui n’a d’ailleurs pas laissé indifférent ma collaboratrice, je vais donc devoir le buter).
Face à lui, une jouvencelle aux yeux écarquillés à l’air tout juste tombée de son nid. Vierge évidemment mais pourtant très sonore dés ses premiers ébats. Dakota Johnson offre sans effort sa plastique dépouillée à une caméra fouineuse. Elle gémit à la première caresse comme une vraie pro. Dakota Johnson aurait eu sa place dans Rome ou Game of Thrones, séries qui ne rechignent pas à explorer les héroïnes sous toutes les coutures. La vestale passe bien vite à la casserole ce qui émouvra sans doute dans les chaumières. Sans vraies formes, transparente, elle aussi correspond au concept global. La séduction est elliptique, la conquête est complaisante, l’abandon est peu crédible. MAIS on ne parle pas ici de passion ou de flamme amoureuse, on est dans le fantasme. Frappée, fouettée, fessée, la brebis est jetée en pâture au loup sociopathe et autocentré. Plus évanescente elle est, plus le concept « vide sur vide » est cohérent.
Christian Grey est un capitaliste qui a réussi à la force des poignets et de la cravache. Sa rapide ascension lui permet d’assouvir ses penchants et fantasmes dans la seconde. Entouré d’un harem de collaboratrices resplendissantes mais acquises, il préfère oser la biche inaccessible. Et il propose un contrat, comme pour acheter une maison. Bonjour le romantisme. Il la prend dans les bras encore et encore et conclut finalement ne pas vouloir être touché. Contradiction. Il la prend en missionnaire mais se réclame d’une sexualité offensive. Contradiction. Il lui promet de la violence mais utilise une plume de Paon. Contradiction. Des promesses de sado-masochisme pour un résultat bien sage, un jeune milliardaire qui roule en Audi et tapote sur un Apple (bonjour l’originalité), un tour en deltaplane pour faire décoller la belle (ooooouh, trop smart).
Au final, n’en attendez pas trop et vous ne serez pas déçu. Pas de scènes renversantes mais rien d’irrémédiable non plus. Pour un peu de chaleur et de frisson, le choix est large. Shame ou Nymphomaniac par exemple. 50 nuances de Grey n’est pas spécialement séduisant, il n’est pas non plus une daube informe. Mais vu l’avalanche de critiques, je lui donne 2,5/5. La prochaine fois, lisez plutôt « L’amant de Lady Chatterley » ou Pierre Louÿs, vous en aurez pour votre argent! Le film est certainement aussi dénué de fond que le bouquin, la cohérence est totale!
La bande annonce :
J’aime le positivisme final de l’article « Le film est certainement aussi dénué de fond que le bouquin, la cohérence est totale! » 🙂