Portrait – Michel Houellebecq

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Il y a des hommes qui ne sourient jamais. Non pas que ce soit forcé, ou juste qu’ils veulent se donner un genre ; non, ce n’est pas ça. On se dit qu’ils ont eu une sale journée, comme tout le monde, comme cela peut parfois arriver. Et puis les années passent, et on voit toujours ce mec en train de porter la misère du monde entier sur sa figure. Alors, c’est bien que ça doit être sa personnalité; que ça fait partie de lui et que personne n’y pourra jamais rien. Quand on le regarde, on en veut à la femme qui l’a quitté et qui lui a si violemment brisé le cœur – à moins que ce soit autre chose.

 

Michel Houellebecq s’appelle en réalité Michel Thomas. Il a changé de nom pour rendre hommage à sa grand-mère, qui s’est dévouée à lui après le divorce de ses parents. Après une vie civile plutôt chaotique, il termine sa course en travaillant pour l’Assemblée Nationale. Ses revenus lui permettent de se dédier complètement à sa passion : l’écriture. En 1998, 7 ans après un recueil de poésie récompensé par le prix Tristan-Tzara, parait Les Particules Elémentaires, un bouquin qui va complètement révolutionner la littérature française contemporaine. Houellebecq écrit avec une véracité déconcertante la misère sexuelle et affective de l’homme moderne, abandonné par les femmes. Tout cela intervient à un moment où la littérature traverse une période de calme plat, et ce sursaut va créer le débat : entre vulgarité et génie, Houellebecq aura eu droit à tous les adjectifs. Il continuera d’écrire, à la fois prose et poésie, et s’exilera en Irlande avec sa deuxième femme. De retour en France en fin 2012, il dira lors d’une interview : “La vie ne m’intéresse pas assez pour que je puisse me passer d’écrire.“ Brillant.

 

C’est certainement l’un des auteurs français le plus connu dans le monde. Pourtant, il se définit par rapport à de nombreux auteurs classiques : Blazac, Stendhal, Zola, allant même jusqu’à Céline. Baudelaire également, auquel il emprunte le thème de la poésie moderne et urbaine ; on peut penser que l’image du poète maudit fait également partie de ce qu’il s’approprie.

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Tout cela l’amène au prix Goncourt en 2010 pour La Carte et le Territoire, prix qu’il a raté quelques fois depuis une vingtaine d’années. Sa remise de prix fera évidemment polémique, car Houellebecq avait annoncé qu’il se retirait du monde littéraire après ce livre. L’Académie Goncourt lui remet donc le prix, officieusement pour le récompenser pour l’ensemble de la carrière avant qu’il se retire. Néanmoins, en 2013 il publie Configuration du dernier Rivage, un recueil de poésie à la limite du mysoginisme, d’où s’échappent certains vers “Les hommes cherchent uniquement à se faire sucer la queue / Autant d’heures dans la journée que possible / Par autant de jolies filles que possible. / En dehors de cela, ils s’intéressent aux problèmes techniques. / Est-ce suffisamment clair ?”. Difficile de se demander à quoi rime tout ceci – c’est le cas de le dire. Et pourtant, il semblerait que l’on soit face à quelqu’un de désabusé, d’écorché vif, qui ne cesse de penser à la “fin de partie” qui l’attend…

 

Cette semaine sort un recueil de toutes ses poésies. Sobrement intitulé Non Réconcilié – Anthologie personnelle 1991-2013, ce livre montre un Houellebecq soucieux des règles, préoccupé par les structures de rimes et les rythmes de ses vers. A l’opposé de ce qu’on a l’habitude de voir chez lui. On rattrape de cette manière une certaine sensibilité, un quelque chose de plus raisonnable. C’est bien connu, on finit toujours par revenir à la poésie, n’est-ce pas Michel ?

 

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